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Jean Letourneur : sculpteur de fractales !

A chaque fois que je passe sous le zizi du David de Michel Ange, rond point du Prado à Marseille, je suis hypnotisé.

Letourneur de pierres

Non pas par le zizi (encore queue…) mais par la force et la puissance d’évocation de ces œuvres de pierre et celles de MichelAngelo en particulier : la sculpture et l’art monumental m’ont toujours fascinés.

Sauf que je n’y connais rien ! Alors, quand un sculpteur renommé m’a demandé une petite présentation de son dernier livre à destination du dossier de presse, aux côtés d’illustres scientifiques, artistes et critiques d’art, j’en suis tombé de ma chaise !

L’histoire vaut d’être racontée…

Photos extraites du site de Jean Letourneur

 

Rencontre avec un homme remarquable

Il est des rencontres improbables, dans l’arbre des possibles, au hasard d’un chaos pourtant bien ordonné…
Un livre sur une de mes expéditions, paru il y a 33 ans, récupéré chez un bouquiniste par un flâneur féru d’alpinisme, de musique et surtout un sculpteur… Livre apprécié et qui me vaut un petit mail sympa. Comme un message d’outre tombe (mon lecteur me croyait mort !). Par curiosité, je me renseigne : cet homme sculpte des fractales à mains nues depuis 40 ans !
Après tous ces voyages, ces plongées et explorations je m’étais, vous le savez, immergé dans l’art algorithmique, substituant à la palette du peintre celle des équations de la géométrie fractale pour créer des visions « d’autres possibles ». Et je croyais bien connaître ce monde hétéroclite de scientifiques visionnaires et négligés, de programmeurs déjantés et d’artistes plus ou moins autoproclamés poussant les logiciels d’imagerie fractale à leurs derniers retranchements. Et je ne connaissais pas l’œuvre de Jean Letourneur ! Honte à moi !

Mais, parce qu’il est issu de la longue tradition de la sculpture « classique », il était passé en quelque sorte à travers les mailles de mon filet, pauvre pêcheur… L’art monumental est toujours un peu intimidant pour le profane. Et pourtant, que de fractales dans cette œuvre, quel turbulent sculpteur ! Jean Letourneur fait partie de cette poignée d’artistes figuratifs qui se sont consacrés au chaos ; attracteurs étranges dans une immensité d’art conventionnel…
Issu moi même d’une famille d’artistes (musique, peinture, écriture) j’ai été élevé dans le culte du beau, du respect des métiers, de l’effort et de la persévérance. Alors, ataviquement, quand on me parle d’art conceptuel, j’ai tendance « à sortir mon revolver ! ». Mais Jean Letourneur est aussi de ceux là et il a la gâchette facile. Ses cartons sur les scandales de l’attribution des marchés publics, par exemple, sont jubilatoires.

Cet art conceptuel « qui souvent commence par des mots et finit par des mots » est surtout l’art de pisser dans des violons.

Sculpture et Chaos, quel héritage, pour quel futur ?

Dans ce dernier livre, préfacé par Jean-Pierre Luminet et qui s’appuie sur une solide culture scientifique, on apprend un tas de choses sur les processus de la sculpture, des concepts comme « le temps long », « l’épaisseur », la perspective, les proportions, autant de métiers et d’excellence en voie d’extinction, noyés dans l’océan de la médiocrité. Letourneur est un sculpteur « classique » mais qui puise dans des sources d’inspiration d’une grande modernité : le monde du chaos, des fractales, de la turbulence, de la symétrie. Domaines très en pointe en recherche mathématique et physique dont on commence seulement à entrevoir l’aspect fondamental.

Il est admis que les artistes ne voient pas la réalité de la même façon que tout un chacun. Mais quand l’artiste se double d’un érudit et s’attache à comprendre le monde à l’aune de la physique quantique, des univers multidimensionnels et du chaos, on peut dire que sa vision est démultipliée. La figer dans la pierre « à mains nues » est un exploit au parfum d’infini.

Quand, pour faire naître, il faut ôter.

Ou l’art de faire naître la beauté, l’harmonie et l’intemporalité à partir d’un bloc de marbre. Oui, les objets inanimés de Jean Letourneur ont bien une âme. La lumière, le point de vue, le mouvement, l’envers des choses… Autant de perspectives qui poussent à réfléchir, à se remettre en question, à changer de paradigme…

Le temps…

Sur les rives d’un lac sacré en Nouvelle Zélande, un sculpteur maori s’apprêtait à coups de ciseau à faire apparaître un Dieu à partir d’une bille de bois. Et m’expliquait :
« Tané est déjà dans le bois, Francis : je ne fais que retirer ce qu’il y a autour ». Il me disait aussi : « Vous, vous avez des montres. Nous, nous avons le temps… C’est bien que de tels icebergs existent. Flottant sans jamais fondre sur la mer des sarcasmes…

Je viens de recevoir le livre dédicacé. Merci ! Et comme elle est élogieuse, cette dédicace, peuchère, je vous la partage illico. Pas de mal à se faire du bien ! 🙂

Et je vous incite surtout à voyager dans cet art singulier sur le site de l’artiste. Pic, pic, pic, pic… Et on recommence 😉

 

Pour Francis Le Guen, véritable écrivain dans la lignée des Saint-Exupéry, c’est à dire de ceux qui risquent d’abord, écrivent après. Espèce en voie d’extinction il va sans dire… Avec mon plus profond respect.

Jean Letourneur

 

 

Je vais donc faire mon possible pour ne pas m’éteindre tout de suite et je vous dis à bientôt pour une de ces désopilantes (quoique formatrices) « chroniques fractales » ! 🙂

 

Publié le Juil 4, 2018

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