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Marseille : plongée de nuit à la calanque de Samena

Les « L de légende » (Manuel Lewin, Anthony Leydet et votre serviteur) s’étaient donc donnés rendez vous ce mardi soir à la calanque de Samena au sortir de Marseille pour une mémorable plongée de nuit « de la nouvelle lune »…

Inutile de ménager le suspens plus longtemps : Anthony est un menteur de la pire espèce, capable d’inventer des cycles biologiques supposés pour le simple plaisir de plonger avec ses potes.

Des cruches à l’eau

Adieu veaux marins, vaches de Steller, cochon qui s’en dédit : en lieu et place des bancs de requin tigres, des poissons lune occultant l’astre de la nuit et des baleines franches du collier, cette plongée s’est transformée en séance chez l’oculiste. Avec des animalcules, certes en quantité, mais ne dépassant pas 4mm pour les plus gros… Tant vont les cruches dans l’eau qu’à la fin, ils se cassent…

Mais quel site ! Manu et moi étions attablés devant le soleil couchant, rouge comme la pizza calmars/piments que j’avais eu l’imprudence de commander sur la terrasse du par ailleurs excellent établissement « Les Tamaris« . Comme mes taquins amis ne manqueront pas de s’en gausser à longueur de web, je préfère l’avouer ici même : ce choix s’est avéré peu judicieux puisque je la rendrais à la mer à l’issue de cette plongée d’1h et demi commencée à 23 h… Cette plongée était à vomir !

Toujours est-il que c’est bardés de caméras, de phares, de flashs, de casque spéléo et d’appareils photo que notre commando se met à l’eau sous le regard effaré des quelques touristes venant de terminer leurs cognacs. Oui, nous n’hésitons pas à affronter les monstres marins que la nuit n’aura pas manqué d’amener sur nos côtes ! Boule rasée, tête nue, avec ses gros tuyaux du détendeur Mistral : Manu ressemble à un plongeur de combat et c’est dans cette ambiance de mission suicide que nous suivons la pente de galets, en direction de la sortie de la calanque. C’est magnifique : je ne vois rien !

Ou plutôt de duveteux moutonnements d’algues hébergeant quelques canettes de bière cabossées. Mais Leydet est déjà comme fou : il nous désigne tout un tas de trucs, parfaitement invisibles. Parfois, Manu et moi nous regardons, interloqués, puis, d’un haussement d’épaule et de quelques coups de palmes, allons voir si les algues sont plus vertes ailleurs…

Plongée au microscope

Il faut dire que notre biologiste marin connait parfaitement les lieux et qu’il à l’œil : son flash se déclenche sans arrêt. Ne voulant pas mourir idiot, je m’approche tout de même. Rien. Je m’approche encore… M’écorche le front sur la roche, louche, et en effet, finalement, aperçois deux minuscules crevettes cachées dans une non moins minuscule anémone. La prochaine fois, je plonge avec mon microscope ! Mais, malgré tout, la poésie est partout. Quand on accepte de plonger en frottant le masque sur le sol, on remarque ces forêt d’acétabulaires, champignons de la mer où se cachent une foule d’être vivants, ou glisse l’étoile de mer pourpre, ou gambade le Bernard l’Hermite qui se croit invisible sous son toit d’anémones.

Un courant d’eau froide nous saisit : nous venons de gagner les abysses, à -12 mètres… Des roches, des tombants que la nuit rend vertigineux. Gorgones jaunes, blanches, poissons hagards que nous dérangeons dans leur sommeil, gros poulpes gluants rêvant d’autres tentacules… Mais foin de littérature, admirez plutôt : voici la poissonnerie de Samena, ouverte la nuit. Pour noctam-bulles !

Allez, on recommence mardi prochain : tournage dans la résurgence de Port Miou cette fois ci…

Pollution nocturne

Hasard du calendrier, cette même nuit était diffusé un reportage sur France 3 à propos de la pollution des sols qui affecte précisément la calanque de Samena. Du plomb, nous en avions à la ceinture mais il y en a aussi beaucoup dans les sols environnant et donc dans l’eau, les oursins et tous les filtreurs. Et de l’arsenic, et du chrome, et plein de métaux lourds issus de l’industrialisation des siècles passés et toujours pas dépollués. On se croirait sur le satellite de quelque exoplanète (ce qui justifie à mes yeux l’immonde trucage de la photo d’ouverture…)

La calanque est en effet tristement réputée pour la pollution de ses sol au plomb et à l’arsenic provenant d’une fonderie de plomb (1850-1925), d’usines de soude ou d’acides et produits chimiques (1804-1890) ainsi que des fours à chaux. Voir une étude exhaustive ici.

L’histoire industrielle du littoral sud de Marseille, vieille de plus de 150, ans lègue de lourds « vestiges » à la zone littorale qui s’étend de la Madrague de Montredon à Callelongue, dans le 8ème arrondissement de Marseille. C’est dans la calanque de Saména que la pollution est la plus visible, les métaux lourds affleurent directement sur la plage et ses abords donnant aux sols des teintes surnaturelles à ces lieux où devrait dominer le calcaire blanc des Calanques.

Arsenic et vieilles calanques

Un peu d’histoire… L’ usine de l’Escalette est créée en 1851, par M. Meynier, pour traiter le plomb, le cuivre, et l’argent. C’est à cette époque que l’Industrie se développe à Marseille. L’usine est bâtie en pierres de taille, et en briques. De longues cheminées rampantes (conduits de cheminées) sont construites parfois sur une longueur de 500 m, pour évacuer les fumées nocives. Tous les deux ou trois ans, ces conduits étaient ramonés pour récupérer les particules de métal mêlées au dépôt charbonneux, qui étaient ensuite recyclées. Un système astucieux de godets roulant par traction sur des rails, permettait de transférer les cargaisons de minerais depuis le Petit Port jusqu’à l’usine située plus haut. A l’époque le Petit Port était une Calanque. Le plomb était amené jusqu’aux Goudes où se trouvait la douane, ensuite les lingots contrôlés et estampillés repartaient en péniche vers le Vieux Port. Plusieurs propriétaires se sont succédés : Les Frères Rodriguez-Ely, Pennaroya, et la Société de l’Escalette. L’activité de l’ usine cesse en 1925. C’est la seule usine de Plomb encore en bon état. Cette dernière devrait être classée Monument Historique Industriel et devenir un musée.

Ci dessous la bande annonce du reportage. Empoisonnée la calanque, c’est sûr, mais aussi empoissonnée : nous nagions dedans !

Et ci dessous, l’interview de la réalisatrice, Valérie Simonet…

Mais on n’arrête pas l’action… Demain, je serais sur la plage Borely, du matin au soir, à faire des photos de champions et championnes qui savent tenir debout sur des os de seiche. C’est la FreeStyle Cup organisée par Sosh… Venez nombreux ! Pour les Twittos : #Sosh

Et… Bonnes baignades !

Publié le Juin 21, 2012

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7 Commentaires

    • Francis Le Guen

      Même sans verres dans le nez, tes vers sur la trompe, c’est quand même du vice ! J’ai bien des photos de cet expectorat bonelien immonde : la photo impossible à cadrer par excellence. Du coup, je vais regarder sur Lightroom, grossissement 10x, histoire de voir les mâles partout… 😉

      Réponse
  1. georges

    Samena…
    Quand j’étais ado, avec une bande de potes tous plus déjantés les uns que les autres, nous aimions bien plonger dans la calanque depuis le parapet de la route… C’est haut et il ne fallait pas se louper…
    En découvrant la plongée, nous y avions testé des bouteilles bricolées avec des extincteurs… (Francis, tu dois te souvenir de ce matériel « darboun »…)
    Là où çà devient rigolo, c’est qu’à l’occasion d’une de ces plongées, nous avions trouvé des grenades, des obus, et même une vieille mine toute rouillée qu’un dingue avait ramené à la surface…
    C’était au début des années 1970….

    Réponse
    • Francis Le Guen

      Ça ne m’étonne pas de toi ! Mine de rien, voilà une info explosive…

      Réponse
  2. Manu

    Ben en 2012… hormis au resto sinon ca manquez de bombes…
    Signé : un des L de « légende »

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    • Francis Le Guen

      Oui, à part Anthony, dégoupillé en permanence, on a pas pété le feu ce soir là… On va se rattraper à Port Miou ce mardi !

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      • Georges

        Vous comptez aller jusqu’où dans Port-Miou, jusqu’au barrage ?

        Réponse

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